Les Couleurs du Goût
- clothildedutry

- 22 oct.
- 2 min de lecture
Il y a, dans la lumière d’octobre, une douceur dorée qui caresse les montagnes comme un sucre lentement fondu. Les ombres s’allongent, les champs brunissent, et le ciel s’embrase d’ocre et de cuivre. L’automne n’est pas qu’une saison : c’est une saveur visuelle.
Sur la table, les dahlias s’épanouissent encore — flamme orangée, stries pourpres, éclats vanillés. Ces fleurs me rappellent combien la couleur et le goût partagent un même langage secret. Car derrière la palette visible, nos sens conversent sans que nous le sachions vraiment.
Quitter le monde des savoirs, c’est fermer la porte aux équations et aux listes de molécules pour entrer dans un autre territoire : celui, chaotique mais fertile, de notre inconscient. Là où la mémoire fabrique des ponts étranges entre odeurs, couleurs et formes.
Pour moi, la vanille n’est pas beige : c’est un monolithe bleu qui luit, épais comme l’asphalte. Le citron, lui, devient un pic vert, aigu, qui crisse dans le palais. Ces images ne sont pas que des fantaisies : la science le confirme.
Les correspondances crossmodales – ces associations naturelles entre les sens – révèlent que les odeurs fruitées se marient souvent aux couleurs chaudes, quand les notes terreuses tirent vers les bruns et verts profonds. Une odeur peut même infléchir la vision : un parfum de caramel fait rosir la lumière, une vanille adoucit le gris.
Et cela ne s’arrête pas là. Une senteur vive, citronnée, sera perçue comme anguleuse ; une fragrance douce, sucrée, évoquera des formes rondes. Nos sens dansent ensemble.
C’est dans ce champ d’interférences que la cheffe étoilée Eugénie Béziat : transformer une senteur en couleur, une note en silhouette, une matière en vibration visuelle. Se demander si une huître est trapèze ou cercle, si un cacao est drap rouge ou éclat prismatique.
Ce jeu de correspondances, à la fois poétique et empirique, ouvre de nouvelles voies pour penser la cuisine — non plus comme une addition de saveurs, mais comme une composition synesthésique, une peinture comestible.
Jung disait que « les couleurs sont la mère de l’inconscient ». Bachelard ajoutait que l’imagination « n’est pas une fuite du réel mais une force qui l’augmente ».
Entre données expérimentales et visions hallucinées, c’est peut-être là, dans cette lumière d’automne, que s’invente l’avenir de nos goûts.
Alors, dites-moi : - votre café du matin — cube ou losange ? - votre parfum préféré — spirale rouge ou tache bleue ?







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